La guitare. Je l'avais découverte à l'âge de six ans, et elle était bien vite devenue toute ma vie. Je ne me lassais jamais d'entendre la mélodie que créait la danse de mes doigts sur les six cordes tendues. La guitare, classique précisons, réussissait là où tous les mots échouaient; elle me permettait enfin de m'exprimer, moi qui avait toujours eu de grandes difficultés à le faire. J'avais commencé à parler très tard, malgré les nombreux encouragements de mes parents. Je n'aimais pas m'exprimer, voilà tout; les gens n'avaient aucunement besoin de m'entendre, la majorité s'en balançaient totalement de mon opinion. Par conséquent, lors de mon entrée à l'école, je fus immédiatement désigné en tant que presque total opposé d'un élève modèle. Je ne posais jamais de questions lorsque quelque chose m'échappait et j'avais bien sûr des notes pour la majorité médiocres. Malgré la déception que cela devait causer à mes parents, je crois qu'ils comprirent que ma véritable place n'était pas dans une salle de classe mais les yeux rivés sur une partition où s'étalaient de fabuleuses notes, la porte d'entrée de mon monde. C'est pourquoi ils acceptèrent de m'inscrire au conservatoire dès que j'en eu le niveau exigé, devenant ainsi à mes yeux les meilleurs parents de la Terre. J'intégrai également plus tard la Yeonsei University, réputé pour ses cours touchant le domaine artistique, domaine dans lequel je me fondais parfaitement. On me vit bien vite une carrière prometteuse, et je récolais prix après prix dans différentes compétitions, de plus en plus prestigieuses.
Seulement, tout bascula après la remise des prix d'un de ces fameux concours.

J'étais monté sur la plus haute marche du podium, et un sourire timide mais satisfait s'étirait sur mes lèvres. Les autres gagnants avaient organisé une soirée dans un petit bar, rien de très extravagant. Je m'y étais rendu, par désir de bien paraître plus que par envie, je dois l'admettre. L'alcool coulait à flots, et j'ai sans doute abusé, je m'en confesse. Lorsque tout le monde commençait à être quelque peu joyeux, un conflit débile entre deux mecs a pourri l'ambiance, et ça a véritablement viré en bataille générale. N'était pas du genre à adore frapper les gens, je me vis bien malgré moi coincé dans cette querelle, et ne pus faire autrement que de me mettre à me bagarrer un peu maladroitement.
Un coup de poing bien placé sur la tempe peut tuer.

Quinze ans. Quinze ans de prison, pour meurtre de ce type dont j'ignorais le nom. Une vie, une carrière brisée, anéantie par ce coup meurtrier. Et cette culpabilité qui m'a rongé toutes ces années, encore plus lorsque je suis sorti de tôle; j'aurais dû pourrir là pour le restant de mes jours. J'étais un assassin, je ne devais pas circuler librement comme ça, c'était insensé...

Cette nouvelle chance est tout ce qui me reste.