18 Juillet 2001. A l'hôpital, c'est l’effervescence. Une femme du nom de Lee Mi Hyun venait de mettre au monde un bébé tout craquant en son genre. Étrangement, il ne pleurait pas à sa sortie du ventre de sa mère. Il riait. Lee Jung Su, le père, se disait qu'à tout les coups, se devait être un coup du destin. Dans le couloir, un adolescent environ âgé de 13 ans se tournait les pouces, assis sur son tabouret. Enfin, on lui dit d'entrer dans la salle. Son petit-frère venait de naître. Lee Yong Woo afficha un énorme sourire bienveillant.
Une histoire bête, trop bête. Comme il en arrive vous savez, parfois, dans les films. Min Woo n'aurait jamais dû connaître cela. Innocent, idiot, souriant, bêtement naïf et gentil.
Je suis tombé amoureux. Je ne l'aurai jamais cru, je pensais que tout cela, c'était au-dessus de moi. Et pourtant, l'avenir me réserve encore beaucoup de surprises je crois. Park Mee Ah, voilà comment elle se nommait. Dans le fond, c'est vraiment moi l'imbécile dans cette histoire.
Ma passion, c'était et cela reste encore la danse. Je ne peux pas vivre sans bouger mon corps au rythme de la musique. Mes amis me disent de m'inscrire à un concours de danse, un truc de ce style, pour quelqu'un me remarque. Yong Woo m'encourage tout ce qu'il peut. Lui, il est plus littéraire et mature, responsable, tout mon contraire quoi.
Je suis ensuite rentré à Yeonsei University. Tout me paraissait splendide, j'étais en plein rêve. Pourquoi ? Je pouvais pratiquer de la Danse dans cette Université. C'était la seule raison qui me rendais heureux. Je ne voulais rien d'autre que de danser. J'ai donc commencé ma première année à Yeonsei. Tout allait bien dans le meilleur des Mondes alors quoi ? Qu'a-t-il bien pu se passer pour que je m'en veuille au point de retourner dans le passé ?
J'étais aimé d'à peu près toute ma classe. Etant sociable de nature, je n'ai pas eu trop de mal à me faire des amis. Notamment une fille de ma classe qui avait l'air d'aimer la danse tout autant que moi : Park Mee Ah. Au fur et à mesure, j'appris à la connaître, ses goûts, ses qualités, ses défauts et je savais, à force de la fréquenter, d'avance ses réactions qui étaient tout du moins assez prévisibles.
A la fin de l'année, je ne traînais presque plus qu'avec elle. On riait bien ensemble mais cela me faisait énormément mal au coeur, à la poitrine. Comme si l'on m’enfonçait une lame de couteau. Je la voyais rire à mes blagues qui n'étaient pas toujours drôles, il faut l'avouer. Mais derrière cette façade pleine de gaieté féminine, elle ne me disait pas tout. Je le savais, il se passait quelque chose dont je n'étais pas au courant.
« Hm ? Pourquoi tu poses à Mee Ah cette question ? Il n'y a rien, ne t'inquiètes pas pour cela ! »
Parler à la troisième personne la rendait encore plus innocente qu'elle ne l'était. J'avais l'impression de ne lui servir à rien. Peu de temps après, je me suis rendu compte de l'amour que j'avais pour elle. Innocente, naïve et tellement légère, elle me ressemblait en tout point.
Tu me mentais. Tu me disais que tout allait bien, tu n'avais pas confiance en moi.
« On est pareils tout les deux ! Tu es gentil avec Mee Ah ! »
Mee Ah était rejetée de la classe à cause de sa différence. Elle se démarquait de part son style très particulier et pleurait tout le temps. Je n'aurai jamais dû la prendre dans mes bras.
« Si Mee Ah meurt... Mee Ah aimerait mourir sous ce cerisier... »
« Pourquoi tu dis ca ?? »
« Comme ca ! »
« T'es vraiment bizarre quand tu t'y mets tu sais ... »
Elle ria.
Tout ce temps-là, pourquoi n'as-tu pas fait semblant d'être bien intégrée comme moi ? Si fragile psychologiquement, la proie idéale des autres élèves. Tu me faisais de la peine, je t'aimais, et tu ne me disais rien de ce qu'il t'arrivait, laissant le mystère planer autour de toi. Alors que moi, je ne souhaitais qu'une seule chose : te protéger.
Lorsque je l'apercevais et qu'elle pleurait, je la prenais dans mes bras. Sans savoir pourquoi elle pleurait, on se comprenait mutuellement. C'était comme elle l'avait dit : " On est pareils tout les deux " .
« Ils te méprisent. » lui disais-je à voix basse.
« Cela ne fait rien ! Puisque tu es avec moi Min Woo ! » me répondait-elle avec un grand sourire.
On avait notre endroit à tout les deux. Une salle de classe inutilisée. Alors que le soleil se couchait, un soir, elle m'a simplement dit :
« Papa rentre à la maison. »
« Et alors ? » me suis-je soudainement inquiété.
« Alors rien. »
L'éternel ne t'en fais pas pour moi, je ne le connaissais que trop bien. Je le pratiquais parfois moi aussi. Ce que je devais maudire c'était...
Pendant un moment, elle a arrêté de venir à Yeonsei. Je m’inquiétais de plus en plus et les élèves n'avait pas arrêté leurs rumeurs sur elle. Un soir, je me suis rendu dans la salle de classe inutilisée. Et comme par magie, elle y était. Ses longs cheveux et son regard à la fois triste et mélancolique me firent m'attendre au pire. Elle ne riait pas sincèrement, je serrais les poings.
« Min Woo... »
« Hm ? »
« Tu sais... Dans une famille normale, on se dit " bonjour " le matin et " bonsoir " le soir. On est heureux de tous se retrouver après une journée épuisante, on s'aiment, on s'adore ! Mee Ah fera la même chose plus tard. Elle cuisinera pour ses enfants et puis après elle se disputera avec Min Woo pour des choses futiles et puis après ils se réconcilieront. »
Je ne savais pas trop pourquoi elle me racontais tout cela, j'essayais juste de comprendre. Je la voyais tourner son regard vers la fenêtre et les immeubles au-dehors, éclairé par les lumières des fenêtres d'appartements.
Où se trouve un monde aussi merveilleux ?
« Mais tu sais Min Woo, ce n'est qu'un rêve. Je suis sûrement une rêveuse. Un monde pareil... »
J'avais peur. J'avais peur de la fin de sa phrase. Sa voix tremblait de plus en plus. Ses yeux noirs de jais brillaient. Hallucination soudaine. Je crois avoir vu des bleus sur sa figure. Je dois sûrement rêver moi aussi. Je dois mieux dormir le soir. Je baissais soudainement la tête. La fin de sa phrase sonna comme la fin du monde.
« ...n'existe pas. »
Je relevais la tête pour la voir me sourire tristement, ses deux yeux grands ouverts vides, et un côté de son visage couvert de bleus. Alors que je paniquais intérieurement, elle continuait de s'apitoyer en souriant tristement :
« Tout cela n'est qu'une illusion Min Woo... Réveilles-toi Min Woo... »
« Qu'est-ce qui t'es arrivée Mee Ah ??!!! »
« Ils mentent tous... »
« Ton visage est couvert de- »
« Mee Ah a effroyablement peur... Tout lui fait peur... Pourquoi tout le monde déteste Mee Ah ? Ils la détestent parce qu'elle est Mee Ah... » commença-t-elle à dire en sanglotant.
« Mee Ah, reprends-toi !! »
Elle cria tout d'un coup.
« Et Papa aussi !!!!!! Alors, pourquoi ? Pourquoi Mee Ah doit continuer à vivre ? ... Mee Ah a peur... » continuai-t-elle en faisant des gestes dans tout les sens, ses larmes volant lorsqu'elle secouait la tête.
« Tu ne seras pas seule Mee Ah. N'oublies pas que je suis là moi aussi, je ne t'abandonnerai jamais. Jamais. Parce que je t'aime beaucoup. »
« Mee Ah t'aime énormément aussi, Min Woo... » finissait-elle de sangloter dans mes bras, à peu près calmée.
Ce que je devais maudire, c'était ma faiblesse. Je n'étais qu'un gamin innocent, faible, sans force pour affronter le monde tel qu'il était. Alors...
« Mee Ah t'aime beaucoup ! »
Quand j'entendais ses paroles résonner dans ma tête, je...
Comment pouvais-je la protéger ?
Trrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr. Trrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr.
Un soir, dans ma chambre, mon portable a sonné. Je l'ai pris assez péniblement, j'aime dormir moi. A l'autre bout du fil, j'entends une voix faible et tremblante de femme, assez paniquée.
« Excusez-moi... Je suis bien chez Lee Min Woo ? »
« C'est moi-même. »
« M-Mee Ah n'est pas chez toi ? »
La question qui m'a fait trembler de tout mon être.
« Elle s'est enfuie de la maison... Je l'ai vraiment cherchée partout mais sans succès... Son père et elle se sont encore disputés et... il l'a encore battue, plus violemment que les autres fois... Je ne sais pas quoi faire... Elle n'est pas encore rentrée... »
« Mee Ah a effroyablement peur... Tout lui fait peur... »
« Mon mari me dit ne pas m'inquiéter mais je ne peux pas m'empêcher alors... »
« Sous le cerisier. »
La mère de Mee Ah n'avait pas l'air de comprendre grand chose mais je lui ai dit que je partais à sa recherche à Yeonsei. Elle m'a répondu qu'elle arrivait de suite.
Je me rappellerai toute ma vie de cette nuit froide et nostalgique à la fois. La lune scintillait de toutes ses forces dans de douces lueurs blanches. J'étais inquiet, l'air n'était pas respirable, comme trop chaud. Je suffoque.
Elle est là. Sa mère crie derrière moi d'effroi. Mee Ah a sauté de la fenêtre de la classe inutilisée et est tombée juste en-dessous du cerisier. Une marre de sang se développe maintenant tandis que je reste la regarder sans rien dire. Sa mère appelle les ambulances, complètement paniquée. Je la prends dans mes bras, encore sous le choc.
« Mee... Mee Ah... Mee Ah... Mee Ah !!! »
L'ambulance arrive. Je déteste ce son de mort. Une seule question se posait à l'instant même dans mon esprit : Pourquoi ?
Quelques heures après, à l'hôpital.« C'est à cause de toi qu'elle a fait ça ! Tu n'arrêtes pas de la pousser à bout aussi ! Comment veux-tu qu'elle soit sereine dans sa tête ??? »
« Tais-toi !! C'est toi qui ne l'a pas bien éduqué ! Tu n'es qu'une bonne à rien, une pauvre mère ! »
Ses parents se disputaient pour savoir à qui était la faute. Personnellement, je le savais déjà. Et cela me mettait en rogne. Et quand quelque chose m'énerve, je peut devenir violent. Impulsif que je suis.
« Comment peut-elle être aussi ingrate avec moi ?? » continuait le père tandis que je m'approchais dangereusement de lui avec le pied du tabouret que je tenais, dans la main, levé bien haut pour pouvoir frapper.
Je n'ai pas manqué ma cible. Le père s'effondre par terre, sa tête à moitié en sang en gueulant :
« Aaaaah !! Appelez la police ! La police ! »
C'est nouveau ça. Énervé, je me mis moi aussi à lui crier dessus, mon tabouret toujours dans la main.
« Ah, parce qu'il faudrait VOUS protéger peut-être ???? Alors que vous battez Mee Ah tout les soirs !! POURQUOI UN ADULTE POURRAIT-ÊTRE PROTÉGER ET PAS UN ENFANT ??? C'EST INJUSTE !!! ET POURQUOI PAS MEE AH ??!!! »
Je m'effondre à genoux par terre, les mains contre le sol, la tête baissée, en pleurant.
« Pourquoi tu as fait ça Mee Ah ?... Je t'avais dis de ne pas m'oublier pourtant... »
« Lamentable... Tu n'a pas à me parler sur ce ton, tu n'es qu'un gosse ! » me répondit gravement le père, toujours la main sur sa tête comme pour empêcher le sang de couler.
Mee Ah... Je pensais que je pourrais t'atteindre... Que mes pensées t'atteindrait... Que mon soutient t'aurait suffit...
Les larmes coulent de mes yeux lorsque je sors de l'hôpital.
Tu as abandonné ce monde où tu voulais vivre heureuse...et moi avec.
2050. Je suis le plus heureux du monde. Alors que je finissais d'apprendre par coeur une chorégraphie que j'appréciais beaucoup, j'ai appris la grande nouvelle. L'Autre Monde en 2020. Refaire ma vie. Mee Ah me revint alors à l'esprit très brièvement. Je pourrais peut-être changer le destin et ne pas la rencontrer. Si elle ne m'avait pas rencontrer, elle ne serait pas imaginé de mourir sous ce cerisier. Je ne crois plus trop en l'amour, tout du moins, je ne sais pas ce que c'est exactement. S'attacher à quelqu'un qui subitement va disparaître de votre vie pour vous faire affreusement mal et vous abandonner ? Non merci. Depuis quelques années déjà, je continue ma vie tranquillement, mon caractère de gamin ne s'étant pas estompé. Refaire ma vie, effacer mes erreurs du passé. Mais qui donc n'en a jamais rêver ?